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L'AMOUR PAIERA LE LOYER

©CulturAT

INTRODUCTION

Le théâtre, depuis l’Antiquité grecque, transporte les spectateurs dans un autre monde, le temps d’une représentation, afin de leur faire vivre des sensations qu’ils ne pourraient pas éprouver autrement. C’est le cas de la pièce L’amour paiera le loyer de Sonia Cotten dont la composition a fait suite à une résidence de création à l’Agora des Arts et qui allie la poésie à la musique (Atuvu, [s.d.], Web). Cette analyse portera sur l’espace théâtral utilisé lors de la représentation, sur l’intrigue, sur le décor, l’éclairage et la sonorisation, sur les personnages, sur la symbolique des éléments scéniques ainsi que sur la présentation globale de la pièce.

Espace théâtral

Espace scénique

Bien que cet aspect ne soit pas demandé dans les consignes, il est intéressant de l’aborder. En effet, la scène n’est pas le seul emplacement où se tient la diégèse. Sonia descend de la scène pour se confronter au public. À plusieurs reprises, elle se trouve directement devant celui-ci, littéralement au même niveau, comme pour faire sentir que cette histoire pourrait arriver à tous les spectateurs de la salle. À un autre moment, Sonia monte au niveau du balcon et surplombe les spectateurs en rêvassant sur son désir de s’élever, de s’envoler. Cette scène est très symbolique dans la pièce, car elle souligne son caractère religieux en présentant Sonia comme un ange. Elle sera d’ailleurs, plus loin dans la pièce, comparée à une fée.

Espace dramatique

La diégèse se passe à divers endroits plus ou moins définis. Les lieux qui sont explicitement nommés sont Toronto et le Tim Horton. On pourrait également dire que les airs sont un espace théâtral, car Sonia dit à un moment être une fée qui s’envole avant de tomber abruptement. Il y a également mention d’une salle de bain où le personnage de Nancy vit une illumination divine (Société Radio-Canada, mercredi 21 septembre 2016, Web).

Intrigue

Une intrigue elliptique

L’intrigue de la pièce de Sonia Cotten revient constamment sur des éléments passés ou fantaisistes. Loin d’être linéaire, cette diégèse plonge le spectateur dans les souvenirs et les rêveries d’un personnage qui espère seulement trouver sa voie. D’ailleurs, il serait probablement impossible de remettre les éléments en ordre chronologique, car ils ne sont pas toujours cohérents entre eux. Aussi, il n’y a aucune transition évidente entre les éléments de la pièce, ce qui ne facilite pas la tâche du spectateur pour en comprendre le sens.

Schéma actantiel

Il est plutôt difficile de produire un schéma actantiel bien défini pour cette histoire. En effet, on n’y discerne pas facilement le vrai du faux. Il est tout de même possible, après une certaine réflexion, d’en venir aux conclusions suivantes.

Le destinateur

Il s’agit de Sonia Cotten elle-même, car c’est elle qui décide de poursuivre un objet, c’est-à-dire de trouver un sens à son existence, un but dans la vie (Âllo prof, [s.d.], Web).

Le destinataire

Là encore, il s’agit de Sonia. C’est elle qui profite de la quête qu’elle s’est imposée puisqu’elle découvre que ce qu’elle désire, c’est se produire sur scène (Âllo prof, [s.d.], Web).

L’objet

Comme cela a été mentionné plus haut, l’objet de cette pièce est la quête d’un objectif. De plus en plus commun comme thème, la recherche de sa propre identité et de ses désirs pour les jours à venir est devenu très présent au Québec. C’est le cas, entre autres, dans le cinéma (Guérin, 2016, document inédit) et (Âllo prof, [s.d.], Web).

Le sujet

Il s’agit toujours de Sonia Cotten puisque c’est elle qui est à la recherche du but de son existence (Âllo prof, [s.d.], Web).

L’adjuvant

On pourrait placer plusieurs personnages dans cette catégorie. En effet, l’homme qui la traîne jusque dans le Tim Horton la met sur la route de sa destinée. On pourrait également dire que le groupe de musique l’aide en lui permettant de monter sur scène et, ainsi, de se réaliser en tant que poète et chanteuse. Cependant, l’adjuvant le plus évident de cette pièce est Nancy Bérubé, une ancienne camarade de classe de l’école secondaire devenue chanteuse et grâce à qui Sonia atteint son rêve de devenir poète. Cela dit, la manière dont elle aide Sonia reste plutôt nébuleuse. Est-ce que Sonia prend sa place dans le groupe en lui volant sa veste? Est-ce que Nancy aide simplement Sonia en lui faisant réaliser, en parlant de son métier de chanteuse, que c’est ce que le personnage principal a envie de devenir? Est-ce que, de manière tout à fait métaphorique, Sonia se trouve simplement à accompagner Nancy sur scène ou même à être Nancy? Il faudrait probablement des précisions de la part de l’autrice sur la pièce pour le savoir, mais au fond, L’amour paiera le loyer n’est pas une histoire qui se veut réaliste et possible à replacer de manière chronologique. En effet, l’objectif de la pièce, c’est de faire perdre les repères aux spectateurs et de laisser place à leur propre interprétation de la diégèse. (Âllo prof, [s.d.], Web)

L’opposant

Plusieurs opposants sont présents dans la pièce, mais aucun n’occupe un rôle précis. En effet, Sonia fait part de plusieurs garçons qui lui ont brisé le cœur par le passé, mais sans les nommer. La souffrance qu’ils lui ont causée est plus importante que les personnages en eux-mêmes. On pourrait aussi dire que les passants à Toronto sont ses opposants, puisqu'elle se sent mal à l’aise parmi eux et qu'ils l’empêchent de continuer son chemin. Métaphoriquement, on pourrait dire qu’ils représentent la pression sociale qui l'effraye à l'idée « d’avancer » en montant sur scène, en devenant l’artiste qu’elle désire être, tout comme son talon haut cassé qui la fait boiter au beau milieu de la ville. (Âllo prof, [s.d.], Web)

Décor, éclairage et sonorisation

Décor

Le seul décor notable est un rideau fait de billes brillantes. De manière symbolique, on pourrait dire que ce voile représente l’aveuglement de Sonia relativement à son désir réel : devenir chanteuse. On pourrait confirmer cette idée en soulignant le fait que Sonia se cache derrière celui-ci à un moment pour mettre sa veste, qui représente l’acceptation de son objectif d’être artiste. Ainsi, elle sortirait de derrière sa propre perplexité pour éveiller la poète qui sommeille en elle.

Éclairage

L’éclairage de cette pièce est très traditionnel. Il suit le personnage principal dans ses déplacements, ce qui aide le public à la repérer, mais il n’a pas de rôle particulier. Le seul moment où il a un attrait hors de l’ordinaire est lorsque Sonia monte sur le balcon. La différence n’apparait qu’aux spectateurs qui sont placés à la même hauteur qu’elle. En effet, de leur point de vue, Sonia ressemble à un ange puisqu’elle se trouve à contrejour de l’éclairage. Cette comparaison entre le personnage et un être divin peut être faite aussi pour les spectateurs qui sont en bas du balcon tel que cela est mentionné dans la première partie de l’analyse, « Espace théâtral », dans la sous-catégorie « Espace scénique ». Cependant, l’éclairage n’a pas d’attrait particulier pour ceux-ci.

Sonorisation

La sonorisation est d’une grande importance dans la pièce. En effet, des chansons de tous genres permettent de plonger le spectateur dans l’intériorité du personnage principal en décrivant ses états d’âme qui passent de la joie à la peine, de la peine à la colère, de la colère au rêve… De plus, il est à noter que des musiciens jouent eux-mêmes la majorité des instruments et que Sonia chante à de nombreuses reprises lors du spectacle. Cette composition n’est pas à négliger, car les textes étaient prévus avant la résidence de création de Sonia à l’Agora des Arts (Corriveau, 27 septembre 2016, [s.p.]).

Personnages

Analyse

Perplexe dans un tournant incertain de sa vie, Sonia se remémore les différentes étapes qui l’ont conduite à sa déchéance. Se comparant à une fée gracieuse qui vole, elle parle de manière poétique et métaphorique de sa chute libre à Toronto. Blessée par un passé amoureux qu’elle ne cesse de ressasser, elle ne sait plus ce qu’elle désire pour l’avenir. Elle n’en reste pas moins rêveuse et pleine d’espoir, persuadée que tout le monde a en soi la petite étincelle qu’il faut pour devenir artiste. S’exprimant tout autant avec le vernaculaire québécois qu’en vers, Sonia est bel et bien une poète aux racines ancrées au Québec.

Avis personnel sur les personnages

Le personnage de Sonia est très profond. Il est rare de voir tant de rêveries dans une seule pièce. On s’envole et on s’écroule avec elle lorsqu’elle monte au-dessus de la scène, dominant le spectateur avec toute la vitalité dont elle est capable, lorsqu’elle parle de cette pauvre fée qui tombe de haut, lorsqu’elle pleure ses histoires d’amour passées. On se reconnait en elle, on a envie de se relever comme elle de nos échecs pour devenir encore plus résistants qu’on l’est déjà. Entendre ce personnage parler, c’est garder l’espoir de croire en ses rêves, c’est trouver la force d’y accéder malgré les obstacles. Tous les passants et tous les talons hauts du monde, au fond, ne sont rien comparé à la volonté de l’être humain et Sonia sait le représenter à merveille.

Symbolique des éléments scéniques

Ce point a déjà été abordé dans les autres parties de cette critique, mais sera traité plus en détail ici.

Le talon haut cassé

Loin d’être négligeable, cet élément est assez récurrent dans la pièce. Bien que l’on ne le voie jamais, Sonia y fait constamment référence : elle parle d’elle-même comme une fée au talon haut cassé perdue à Toronto. Ce fameux talon haut montre la manière dont le personnage principal perd pied dans la vie, son inconfort et sa difficulté à avancer. C’est une sorte de béquille qui ralentit son accès à un rêve qui la dépasse : devenir chanteuse.

Le rideau de billes brillantes

Cet élément du décor est la représentation matérielle de l’incapacité de Sonia à savoir ce qu’elle désire devenir. Elle s’y cache à la fin de la pièce pour mettre sa veste lorsqu’elle décide de devenir chanteuse.

La veste

La veste que porte Sonia à la fin représente sa détermination à devenir artiste. Elle en fait d’ailleurs référence durant toute la pièce, surtout lorsqu’elle parle de Nancy Bérubé. C’est aussi une manière de remettre en question l’interprétation que l’on peut avoir sur la manière dont elle a commencé à devenir artiste puisque l’on ignore si elle a volé la place de Nancy en même temps que sa veste.

OPINION GLOBALE DE LA PIÈCE

Bien que difficile à comprendre, cette pièce a énormément plu. Tout d’abord, elle a su satisfaire le public par son côté poétique qui est de plus en plus absent des textes, tant au théâtre qu’en littérature et dans les chansons. Ensuite, le spectateur a pu apprécier le côté rêveur de cette histoire. Plutôt que de suivre une diégèse chronologique, cette pièce le plonge dans un monde onirique et fantaisiste qui lui permet de s’évader le temps d’un spectacle. Comme cela est traité dans l’introduction, l’objectif d’une pièce de théâtre est avant tout de faire vivre au spectateur des émotions qu’il ne pourrait pas vivre autrement. L’amour paiera le loyer a amplement su satisfaire le public à cet égard. Il est passé par une grande gamme de sentiments en regardant cette pièce : il en est ressorti ému et prêt à soulever des montagnes pour atteindre ses rêves.

 

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